Letra: Boris Vian - Música: Boris Vian/Harold Berg
Preludio recitado: Le dormeur du val (Arthur Rimbaud, 1870)
LE DORMEUR DU VAL
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
Je m'en vais déserter
Depuis que je suis né
J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins
Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens:
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer
Es un rincón de verdor donde un arroyo canta,
imprimiendo locamente a la hierba jirones
plateados; donde el sol, desde la altiva montaña,
reluce: es un vallecito que espumea rayos de luz.
Boquiabierto, un joven soldado con la cabeza descubierta
y la nuca bañada en el fresco berro azul,
duerme; está tendido en la hierba, bajo las nubes,
pálido en su verde lecho donde llueve la luz.
Con los pies en los gladiolos, duerme. Sonriendo como
haría un niño enfermo, echa una cabezadita.
Naturaleza, mécelo cálidamente: tiene frío.
Los aromas ya no estremecen las ventanas de su nariz:
duerme al sol, la mano en el pecho.
Tranquilo. Hay dos hoyos rojos en su costado derecho.
Señor Presidente
Le escribo una carta
Que tal vez leerá
Si tiene tiempo
Acabo de recibir
Mis papeles militares
Para ir a la guerra
Antes del miércoles por la tarde
Señor Presidente
Yo no quiero hacerla
No he venido a la tierra
Para matar a pobres gentes
Sin ánimo de molestarle
Es preciso que le diga
Que mi decisión esta tomada
Voy a desertar
Desde que nací
He visto morir a mi padre
He visto irse a mis hermanos
Y llorar a mis hijos
Mi madre sufrió tanto
Que está ya en la tumba
Y re ríe de las bombas
Y se ríe de los gusanos
Cuando era prisionero
Me quitaron a mi mujer
Me quitaron mi alma
Y todo mi pasado
Mañana temprano
Cerraré la puerta
En las narices de los años muertos
Iré por los caminos
Mendigaré mi vida
Por las carreteras de Francia
De Bretaña a Provenza
Diciéndole a la gente:
Negaros a obedecer
Negaros a hacerla
No vayáis a la guerra
Negaros a partir
Si hay que dar la sangre
Vaya usted a dar la suya
Usted es un buen apóstol
Señor Presidente
Si me hace perseguir
Prevenga a sus gendarmes
De que no llevaré armas
Y que podrán disparar
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